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"OPUS COEUR"... C'était au théâtre de Surel les 21 et 22 octobre.

OPUS COEUR n'est pas seulement un drame dont le schéma a souvent été utilisé: la rencontre improbable de deux solitudes que tout sépare et qui vont finir par se rencontrer et s'aimer. Ici, Jacob, un professeur condamné par la maladie à une fin annoncée, recrute Kathleen comme employée de maison. Mais de cette histoire parsemée de révélations et d'épisodes inattendus, Israël HOROVITZ nous engage dans une réflexion sur la connaissance et la culture.

Jacob s'est muré dans une citadelle qu'il a voulu imprenable. Il a été un universitaire intransigeant, musicologue et professeur de lettres qui s'est servi de sa fonction pour refuser aux autres l'accès à la culture. Pour lui la culture est un enjeu de pouvoir.
Il n'échange avec ses pairs qu'à l'aune de son savoir. S'il a aimé la propre mère de Kathleen il l'a tout de même exclue au savoir lui refusant l'accès à l'université.
Il entretient cette domination. Il se sert du subterfuge d'un sonotone factice pour mieux surprendre le jugement des autres sur lui-même. Ce qu'il entend alors est un jugement hostile et sans appel. Il y recherche un alibi supplémentaire qui lui permet de condamner l'accès des autres à sa tour d'ivoire.


A la moitié d'une vie qui ne lui a apporté ni bonheur ni attrait, Kathleen porte en elle un regret, une frustration fondamentale. Elle n'a pas pu accéder à son rêve d'épanouissement, la connaissance et la pratique de la musique. C'est Jacob qui lui a interdit l'entrée à l'enseignement de la musique, comme à toute sa famille, provoquant drames et misère sociale. Ce qu'elle vit, n'est pas un simple ressentiment, mais une haine violente qui peut la pousser au crime. Elle se contentera dit-elle "du plaisir à le voir mourir enfin".
La pièce suit une lente progression dramatique vers un choc frontal terrible. Les mots alors sont crachés dans un face à face brutal et sans concession où chacun hurlera sa vérité.
Mais la musique, présente tout au long de la pièce comme un troisième personnage, interviendra à la manière d'un médium délicat mais déterminé. La muraille d'incompréhension et d'hostilité qui s'est dressée entre Jacob et Kathleen ne va pas se briser sous le fracas de la colère de dieux wagnériens. Non, la musique va peu à peu sourdre sous les fondations et fragiliser cette digue qui finira par s'affaisser sous son propre poids. Elle va s’immiscer peu à peu, avec douceur, pour être enfin partagée.
Le dernier tableau montre alors un professeur utilisant ses dernières forces à transmettre son savoir à cette femme qui pourra enfin commencer une deuxième vie apaisée. La mort de l'un et la renaissance de l'autre portent en elles la culture non plus enjeu de pouvoir, mais objet de partage inestimable.

La mise en scène de Claire Mercier et le jeu des deux comédiens, Claire Mercier et André Ruiz nous ont impressionnés. Quant à la musique dont les morceaux ont été très explicitement choisis par l'auteur et "mis en onde" par Pascal Coignet, n'était pas un simple accompagnement, mais un vrai médium porteur de sens, celui de l'émotion du partage jusqu'à la conclusion sous l'archet du violoncelle de Claire Mercier.
Un très bon moment de théâtre.


AP
"OPUS COEUR"... C'était au théâtre de Surel les 21 et 22 octobre. "OPUS COEUR"... C'était au théâtre de Surel les 21 et 22 octobre. Reviewed by Coubert on 6.11.16 Rating: 5

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