Deux soirées pour deux compagnies,
deux sujets, liberté et résistance, sur un même chemin.
Vendredi, neuf comédiens de la Cie des
Javeysans ont prêté leur voix à Victor Hugo, Louise Michel,
Robert Desnos, Jacques Prévert, Stéphane Essel, et aussi Martin
Luther King, Nelson Mandela, Maram al-Masri...Bien d'autres auraient
pu faire parti de cette liste tant les menaces à la liberté
rivalisent d'ingéniosité et d'horreur partout dans notre monde.
Notre monde perpétuellement malade, où les hommes, les femmes et
les enfants sont privés de liberté, torturés, violés, massacrés.
Alors, comme le conte une légende amérindienne, le petit colibri
exemplaire peut-il éteindre le brasier destructeur, est-il le point
de résistance ultime qui peut nous donner un peu d'optimisme?
Les comédiens très concernés et
impliqués ont su nous transmettre l'émotion et la passion contenues
dans ces textes choisis avec soin. Les chants (ah ça ira, le temps des cerises et bella ciao) ont colorisé discrètement une "mise en lecture" fort réussie. Les spectateurs sont venus
très nombreux et en auditeurs attentifs et captivés, ils ont
applaudi très chaleureusement à cette présentation.
Samedi la Cie de l'Oeil Nu (Serge
Brozille et Christiane Gatt-Brozille) ont mis la résistance et la
vie de clandestinité de Louis Aragon et d'Elsa Triolet au cœur de
la "mise en voix" des textes de ces deux écrivains.
Ils ont lu des poèmes et des récits
de "leur" histoire de 1927 à 1945, cette période de
résistance vécue dans notre région. Un foisonnement de textes et
une mise en abîme de la vie du couple dans l'histoire de la
Résistance.
Que retenir? Ceux qui nous ont le plus
émus et "secoués" sans doute. Ainsi le récit d'Elsa dans
un village frontalier français où des paysans n'ayant rien, tente d'accueillir
un flot continu de réfugiés espagnols privés de tout. Celui de
Louis nous faisant revivre le parcours halluciné d'un commandant
nazi, le visage plaqué par les résistants sur les atrocités perpétrées par
ses hommes, comme autant de stations d'un chemin de croix de
l'horreur humaine.
Christiane et Serge Brozille nous ont
"captivés" (rendus captifs), à leurs lèvres suspendus.
L'émotion était palpable dans un public très nombreux et tout en
écoute. Une lecture "interprétée" par deux grands
talents. La conclusion fut une évocation photo des deux écrivains sur un poème d'Aragon (est-ce ainsi que les hommes vivent). La version contemporaine chantée par Bernard Lavilliers venait nous rappeler fort opportunément combien notre présent peut être dangereusement perméable à l'histoire.
Pour ces deux spectacles nous disons
merci d'avoir osé exister. Ces textes nous remettent en mémoire la
face la plus sombre de l'homme. Notre présent nous contraint
malheureusement à penser que nous ne pouvons la rejeter dans le
passé et que l'homme ne peut se défaire de sa mue la plus hideuse.
La liberté n'est pas un acquit mais
une vigilante conquête de tous les instants, par la résistance.
Cela nous apparaît comme un rappel urgent à l'issue de ces deux
spectacles. Merci à la Cie des Javeysans et à la Cie de l'Oeil Nu
de l'avoir fait de façon aussi intelligente et convaincante.
Alain Panaye
Liberté Clandestinité Résistance ...à la chapelle de Surel
Reviewed by Coubert
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lundi, mars 13, 2017
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