Jacob s'est muré dans une citadelle
qu'il a voulu imprenable. Il a été un universitaire intransigeant,
musicologue et professeur de lettres qui s'est servi de sa fonction
pour refuser aux autres l'accès à la culture. Pour lui la culture
est un enjeu de pouvoir.
Il n'échange avec ses pairs qu'à
l'aune de son savoir. S'il a aimé la propre mère de Kathleen il l'a
tout de même exclue au savoir lui refusant l'accès à l'université.
Il entretient cette domination. Il se
sert du subterfuge d'un sonotone factice pour mieux surprendre le
jugement des autres sur lui-même. Ce qu'il entend alors est un
jugement hostile et sans appel. Il y recherche un alibi
supplémentaire qui lui permet de condamner l'accès des autres à sa
tour d'ivoire.

La pièce suit une lente progression
dramatique vers un choc frontal terrible. Les mots alors sont crachés
dans un face à face brutal et sans concession où chacun hurlera sa
vérité.
Mais la musique, présente tout au long
de la pièce comme un troisième personnage, interviendra à la
manière d'un médium délicat mais déterminé. La muraille
d'incompréhension et d'hostilité qui s'est dressée entre Jacob et
Kathleen ne va pas se briser sous le fracas de la colère de dieux
wagnériens. Non, la musique va peu à peu sourdre sous les
fondations et fragiliser cette digue qui finira par s'affaisser sous
son propre poids. Elle va s’immiscer peu à peu, avec douceur, pour
être enfin partagée.
Le dernier tableau montre alors un
professeur utilisant ses dernières forces à transmettre son savoir
à cette femme qui pourra enfin commencer une deuxième vie apaisée.
La mort de l'un et la renaissance de l'autre portent en elles la
culture non plus enjeu de pouvoir, mais objet de partage inestimable.
La mise en scène de Claire Mercier et
le jeu des deux comédiens, Claire Mercier et André Ruiz nous ont
impressionnés. Quant à la musique dont les morceaux ont été très
explicitement choisis par l'auteur et "mis en onde" par
Pascal Coignet, n'était pas un simple accompagnement, mais un vrai
médium porteur de sens, celui de l'émotion du partage jusqu'à la
conclusion sous l'archet du violoncelle de Claire Mercier.
Un très bon moment de théâtre.
AP
"OPUS COEUR"... C'était au théâtre de Surel les 21 et 22 octobre.
Reviewed by Coubert
on
6.11.16
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